« Le créole martiniquais est une langue créole parlée en Martinique et parmi la diaspora martiniquaise. Elle n'a pas le statut de langue officielle en Martinique, mais il s'agit d'une langue régionale parlée couramment dans toute l'île. Elle est très proche des langues créoles des îles voisines, tel que le créole dominiquais, saint-lucien, haïtien et guadeloupéen (la différenciation d'avec ce dernier ne date que du XIXe siècle 2). Le créole martiniquais, tout comme les créoles guadeloupéen, haïtien, saint-lucien et dominiquais, est de base lexicale française. Toutefois, il emprunte parfois à l'anglais, notamment sous l'influence des créoles des îles anglophones voisines, qui, bien qu'étant de base lexicale française, sont perméables à la langue officielle anglaise. »
source: extrait du site Langues et grammaires en (île de) france http://lgidf.cnrs.fr/creole-martiniquais
Dans le cadre d'un devoir que je devais rendre pour mon master, je devais trouvé un sujet en comparaison avec lune étude sur les apprentissages formels et non formels des écoliers Karens (concerne la Thaïlande). J'ai trouvé qu'il serait intéressant de faire l'étude du cas de la Martinique . Cette île est un territoire français, qui se situe à 7000 km de la métropole. Elle est à la fois région et département d'outre-mer. En France, on écarte les différences culturelles, elles ne sont pas valorisées, sauf quand il s'agit de l'anglais, de l'allemand, de l'espagnol et de quelques autres langues. Les langues régionales ne sont pas valorisées non plus. L’état n'a pas signé la charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Dans cette charte, il est question de protéger et valoriser ces langues, notamment au sein de l'enseignement. La France considère que c'est une menace à l'identité nationale, qui pourrait amener à remettre en cause d'autres de ses symboles. On peut les prendre en cours optionnels simplement. En France, on valorise des langues «étrangères », celles qui apparaissent le plus sur le marché européen et on tente de favoriser l'intégration, en offrant des cours de langue optionnels, pour les enfants de travailleurs migrants.
Pour la Martinique, qui est un territoire français, donc qui dépend de l'éducation nationale française, on se demande comment est ce que le problème est géré. Il y a des influences françaises, dont la langue est instaurée comme étant la norme, ainsi que des influences ''antillaises'' et si on pousse plus loin, des influences d’Afrique sub saharienne. Sur la plate-forme conçue par la direction de l’Enseignement scolaire du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche,(ÉduSCOL), qui s’adresse plus particulièrement aux enseignants, aux personnels de direction, et aux corps d’inspection, il est écrit que : « La convention de partenariat signée en février 2011 par le ministre de l'éducation et le président de la Région Martinique officialise l'apprentissage de la langue et de la culture créole et trace les lignes d'un dispositif cohérent depuis l'école jusqu'au lycée. » Les objectifs de ce dispositif sont : « valoriser la langue et la culture créole dans la formation des élèves tout au long de leur parcours scolaire, viser le bilinguisme et un plurilinguisme maîtrisé, proposer un apprentissage précoce, dans le respect du choix des familles, développer un réseau éducatif de proximité pour garantir l'égalité d'accès à cet enseignement précoce, sensibiliser les familles aux enjeux et à l'intérêt de la politique linguistique partenariale. »
L'évaluation des dispositifs montrent que que la pratique des langues d'origines est bénéfiques aux apprentissages solaires. Cela permet aussi l'épanouissement affectif et intellectuel des élèves, le développement de leur capacités de communication orale, et de leur écrit. Ils ont une meilleure maîtrise de la langue de scolarisation et à long terme, ils ont une meilleure acquisition des savoirs scolaires. Il y a deux dispositifs mis en place : Langue et Culture Régionale et l'enseignement du créole comme langue étrangère. Mais il n'y a qu'une infime partie des élèves qui en bénéficient. Le créole en LCR est enseigné optionnellement dans le primaire, face à l’anglais et l'espagnol. Au collège, il est considéré comme LV3.
Entretien avec un jeune étudiant Martiniquais de 23 ans
J'ai contacté cette personne car il a fait la quasi totalité de sa scolarité là bas, donc il connaît bien le sujet. L'entretien s'est déroulé à partir d’audio que nous nous sommes envoyés, ce qui a peut être pu porter un peu à confusion pour certaines réponses. Je lui ai expliqué notre thème, je lui ai dit de quoi parlait notre texte sur les karens et pourquoi je voulais parler de la Martinique. Étant un ancien étudiant en sociologie, je lui ai directement fait part de ma méthode, qui serait celle de l'entretien semi – directif ou du récit de vie. J'ai donc amené le sujet simplement en lui demandant de parler de la transmission des savoirs ( agricoles, langagiers, etc... au sein de l'école) et s'il pouvait, qu'il me parle de l'évolution, s'il y en a eu une, entre sa génération et celles de ses parents.
Moi : Le sujet choisi est « transmission des savoirs locaux au sein de l'école ». J'ai vu qu'il y avait une convention état région Martinique où ils disent qu'ils officialisent l'apprentissage de la langue et de la culture créole, c'était en 2011. Je pense pas que tu étais en France à ce moment là, donc est ce que tu sais comment ça se passe ? Si c'est vraiment appliqué ? Est ce que le créole est utilisé ? Je précise que ce sont les savoirs locaux, ancestraux, traditionnels qui m'intéresse.
JB : Ok ok, tu as choisi le bon lieu parce que il y a beaucoup de choses qui se passent. Il y a beaucoup de savoirs faire malheureusement qui sont perdus de part aussi l'ancrage de la culture occidentale puisqu'on est une colonie, malgré tout, même si on est reconnu en tant que département français. Il y a aussi un conflit en fait culturel puisqu'on a notre propre culture et la France a sa culture à elle et c'est ça en fait qui cause parfois problème, mais bon je vais pas m'étaler plus, je vais bien prendre mon temps de t’expliquer en longueur et en largeur comment la transmission est assurée à la fois dans le foyer familial et aussi par rapport à l'école, puisque c'est deux mondes différents Dis toi aussi que nous à la base, on est sous l'éducation nationale, donc du coup, y a une différence entre ce qu'on apprend à l'école et ce que nos parents nous apprennent tu vois. Ils essayent de plus en plus de nous sensibiliser par rapport à notre propre culture, de plus en plus, le travail il est fait à l'école mais.. bon je vais pas m'étaler. C'est vrai que y'a pas mal de choses à dire
(suite)
JB : Après, les modes de transmissions, ils sont à peu près pareil , si je dois dire, sur le plan international, oui, c'est à peu près la même chose. En Martinique, ça se fait par les écrits, par voie orale et de visu aussi. C'est comme ça que la tradition se perpétue. J'amorce un peu.. j'ai pas encore franchement le thème, mais juste pour étayer le sujet tu vois.. Moi en fait, tu sais que je fais de la musique, donc j'ai fait du tambour à la base. Le tambour m'a été transmis par mon père qui lui l'a appris avec d'autres tambouyé (?) Ça se faisait comme ça avant.. donc on va dire que au plan théorique, les anciens n'avaient pas vraiment de théories, donc en fait il fallait vraiment écouter, essayer de regarder comment il fait parce qu'il t'expliquait pas , le gars il arrive avec son tambour et puis il joue le tambour devant toi et toi tu reproduis. Avec les années, ça s'est un peu plus... on va dire... avec l'influence de la France aussi, puisque la France, on est basé essentiellement sur la pédagogie, il y avait pas vraiment de pédagogie dans les années 60, 50 et on va dire, ça s'est un peu amplifié dans les années 90, 2000 et y a un peu plus de pédagogie. Donc moi, mon expérience du tambour, voilà, elle m'a été transmise comme ça en fait, par voie orale , et puis bon, j'avais un petit peu de théorie, puisque bon, on était la mouvance 2000. De ce que je connais des anciens, eux, à leur époque, ils avaient pas forcément le droit de pratiquer le bélé ( tambour), puisque je te parlais du bélé justement, que je pratique depuis une vingtaines d'années.. j'ai eu pas mal d’élèves aussi.. j'ai transmis à peu près ce que je sais, mes connaissances, avec une certaines forme de pédagogie, avec des fiches, ce qui n’existait pas dans les années 60. Le bélé est arrivé en 1600, en fait .. il a .. l'esclavage a commencé en 1400... il s'est développé en 1500 par là, 1580.. j'ai pas de date précise, puisqu'il n y a pas vraiment de date précise, en tout cas il a été autorisé en 1602 puisque ça permettait aux esclaves justement d'améliorer leur rendement, donc les colons autorisaient , puis qu’avant ils n'autorisaient pas les esclaves à s'exprimer sur le bélé, donc du coup ils ont utilisé cette musique là pour améliorer les rendements, ça a donné de la force aux esclaves et eux ils pouvaient justement s'exprimer, exprimer les galères qu'ils vivaient, les souffrances perpétrées par la doctrine esclavagiste, les coups de fouets on va dire ça fait mal, aussi couper la canne sous le soleil chaud... donc la douleur du travail tu vois. L'effort physique intense, il fallait justement un moyen d'expression pour se libérer de toutes ces souffrances là, donc du coup ils utilisaient la musique et de la est né le bélé. Y a eu aussi le Gwo Ka, qui est né avec le même procédé, en fait, c'est à dire, l'expression des souffrances des esclaves, comme pratiquement toutes les musiques afro caribéenne, c'est parti... enfin l'esclavage a eu une influence. Y a des musiques qui sont nées... ba comme le jazz.. les musiques sont toujours évocatrices d'une période où les noirs luttaient pour quelque chose. J'ai écouté pas mal d'anciens parler et eux, quand ils étaient petits, leur parent ne voulaient même pas qu'ils parlent créole déjà, donc déjà tu as la transmission de la langue.. Le bélé c'est en créole, c'est pas en français donc du coup c’était chanté en créole.. mais y a pas mal de choses à dire en fait. Donc voilà, j'ai déjà commencé une introduction pour toi, une entrée en matière on va dire. Je lui réexplique le sujet et ce que je cherche à savoir
JB : Comme je t'ai expliqué, moi je fais du bélé, donc le bélé, tu pourras chercher sur internet, y a des sites détaillés, y a des vidéos, donc tu pourras te faire une idée sur le bélé. Je fais du bélé depuis la primaire. C'est une langue aussi, la langue que j'ai eu... bon j'ai eu le français... j'ai parlé français avant de parler créole. En Martinique on a un gros problème identitaire , et quand je dis un gros problème identitaire, on va dire qu'il y a plusieurs facteurs.. Il y l'influence de la France, sur l'histoire, mais aussi sur la langue. Comme tu l'avais bien précisé, il y a le créole comme langue régionale mais on a aussi le français comme langue nationale, étant aussi un département d'outre mer et colonisé pendant plusieurs années, jusqu'à aujourd'hui, pendant plus de 400 ans par la France, donc on va dire que nous sommes français par défaut, et nous parlons français, mais majoritairement le créole, heureusement, par la grâce de dieu, que nous ne nous sommes pas laissé endoctriner, dans l'esprit du bon petit français, qui mange son petit biscuit petit beurre et puis qui va à l'école bien sagement, sans rien dire, nous on a appris à se défendre en tant que noir, on a appris à se mobiliser. Y a eu pas mal d’événements historiques, qui se sont passés en Martinique, je peux pas tous te les énumérer, y a février 1900, on a aussi revirer 2005, euh non, 2009, on avait fait une grande grève pour la baisse des prix, au final ça n'a servit à rien. Y a aussi St Pierre, la montagne, la montagne pelé qui a explosé, du coup, y a eu pas mal de morts, dont un survivant Cyparis... Pendant février 1900, tu as les gendarmes, qui étaient venus puisque les béké, comme on les appel ici, donc il y a béké, justement c'est le colon, c'est le blanc des Antilles, le blanc qui s'est installé aux Antilles et qui a colonisé pendant des années et des années, qui a .. on va dire que c'est un esclavagiste. On appel béké aujourd'hui, ça a toujours été ça, on a toujours appelé les béké, béké. Comme je t'avais dit , ça va être très très long, je vais essayer de faire très court, pour que tu ais pas 10 000 pages à écrire. Donc comme je t'ai expliqué, euh moi je fais du bélé, qui est une danse d'esclave, qui vient d'Afrique, bien sûr, plus précisément du Congo. Je suis originaire, de ma mère et de mon père, du Congo. Ma mère c'est Zumba, mon père c'est Gina. Donc mes ancêtres sont arrivés, des deux côtés, que ce soit du côté maman et du côté papa, ils sont arrivés après l'esclavage en Afrique, et du coup, au fil des voyages, on est arrivé en Martinique. Donc on a pas.. je pense que les descendants de mes descendant on peut être subi l'esclavage, je sais pas, mon père ne m'a pas donné cette information là, ni ma mère donc voilà. Dans Gina, il y a le « n » comme pas mal de nom africains, y a le « n' ». Donc ils ont enlevé le « n », donc déjà, comme on avait vu justement avec mr Coulmont, l'influence qu'a eu la France sur les noms. Comme beaucoup de français déportés, d'étranger déportés en France, puisque moi je me considère comme un étranger déporté aux Antilles, même si je suis né sur le territoire français mais ma famille sont des africains, on est noir, on est africain, point final, on a pas un débat à faire sur ça. Mon nom a été francisé, donc voilà, déjà, on a l'influence de la France par rapport à ça. Je parle créole mais à l'école on parle que français, uniquement, les cours sont en français, et même les cours d'anglais sont en français, ils sont en franglais parce que la France, leur objectif, c'est que le français soit partout Dans les années 60, l'époque où mes parents sont nés, les années 60-70.. mon père est né en 63, ma mère un petit peu plus tard, 68.. euh mes grands parents et la génération de nos grands parents, toi tu viens de l'Afrique comme moi, on est africains, bien que je soi antillais mais bon l'histoire de division Afrique Antillais, bon ça n'a pas lieu d'être pour moi. En tout cas mes grands parents refusaient que leurs enfants parlent le créole, il était interdit de parler à ses parents le créole, moi j'ai vécu comme ça aussi, je parlais pas créole. Je sais pas pourquoi, on va dire que c'est par habitude, c'est presque inscrit en moi, j'arrive pas à parler créole à mes parents, pourtant c'est une langue comme les autres, tu vois, le créole c'est une langue comme les autres, donc on devrait pouvoir parler librement le créole, or c'est pas le cas, on va dire que c'est un petit bémol, voir un gros bémol mais bon, on va dire que c'est la tradition, c'est culturel, les enfants ne parlent pas créole à leur parents, à moins qu'ils aient 30 – 40 ans et qu'ils soient chez eux. J'ai vu mon père parler créole à son père, mais ils étaient déjà grand, ça c'est différent, c'est autre chose. Par contre, quand j étais à l'école, on va dire que la transition primaire, collège, quand je suis arrivé à l'école , je voyais que tout le monde parlaient créole entre eux, j’étais pas habitué à ça par exemple, je vois que mes amis parlent créole entre eux, déjà ça m'a mis un petit peu plus à l'aise , je me retrouve dans mon monde, quand je parle créole, c'est autre chose, tu vois, je réfléchis différemment, on te le dit, après c'est psychologique aussi, c'est plus que psychologique en fait, c'est le cerveau qui réfléchit comme ça, quand tu changes de langue, tu changes d'état, et je me sens beaucoup plus naturel en parlant créole, qu'en parlant français, bien que la langue française, c'est une belle langue, la langue des lumières etc... Je pense m'exprimer très bien en français, j'ai pas de problème de syntaxes etc, bon voilà, j'ai pas de soucis en français. Je m'exprime tout aussi bien en créole, bien que, plus les générations avancent, plus les jeunes parlent créole français en fait, c'est à dire que leur créole n'est pas créole, il est tellement influencé, on va dire qu'ils sont tellement influencés par le français, et c'est pour ça qu'on a voulu en fait, en Martinique, et pour nous, mettre le créole à l'école, c'est pour ça que tu as le créole.. moi j'avais , quand j’étais au collège, y avait l'option créole, c’était pas un cours obligatoire, puisque c'est des options, donc tu choisis, moi j'ai pas choisi créole puisque bon je jugeais parler bien créole mais bon , je pense que j'aurais dû le choisir. Y a même créole à l'université, par contre c'est tout récent le créole à l'université, dans l'institution, c'est récent, ça n'a pas plus de 10 ans et c'est déjà un grand pas. On va dire qu'en fait, à l’école, la culture ne se transmet pas vraiment, ça a pris des années en fait, ça a pris des années pour que justement l'état français reconnaisse les cultures régionales, ça a pris vraiment beaucoup de temps, puisque en fait, chaque région a son patois, nous c'est le créole, c'est comme un patois, c'est des langues qui ne sont pas parlées par .. au niveau national, du coup, en Martinique, on a eu besoin de revendiquer nos valeurs culturelles, puisque la France, ils ont, ont va dire qu'il y a des cultures nationales, y les variétés françaises, y a pas mal de petites choses et nos grands parents , mes grands parents, je pense que tes grands parents aussi, ou même tes parents, ont baigné dans la variété française, Johnny Hallyday, Charles Aznavour... mes parents aussi ils ont connu beaucoup de variétés françaises et d'autant plus que je pense que leur musique à eux, c'est à dire la musique du pays, on va dire notre fond de.. notre base culturelle, notre base musicale était considérée, par nos grands parents, comme musique « sale », une musique qui était jouée par des gens qui faisaient pas du vaudou, mais c'est comme une forme de vaudou, des gens qui ont les mains sales et qui font du mal aux autres, qui font appels à des entités.. c'était un peu ça en fait.
Pour avoir un point de vue peut être différent ou avoir des informations en plus, j'ai contacté un autre martiniquais, âgés de 28 ans, qui a été jusqu'au lycée là bas.
« Jo :Le créole, tu l'apprends selon les familles. Moi j'ai appris ça depuis tout petit, donc.. comme j'ai vécu là bas, tu apprends, mais c'est pas tout le monde hein, ça dépend. Il y a des familles où les parents ne parlent pas créole pour leur enfant, ils parlent que français, donc l'enfant il comprend le créole mais il parle français, après nous, dans ma famille on a appris ça depuis l'enfance, le créole etc, après la culture, je pense que c'est plus la famille qui te l'apprend, parce que à l'école, à mon époque, c’était.. tu parlais français hein, les profs parlaient français pour toi, tu parlais français. Dans la cour, avec tes potes, avec tes amis, tu parlais créole. Humm , quoi d'autre.. Ouais c'est y a pas longtemps qu'ils ont mis ça, qu'ils ont mis qu'ils apprennent le créole en classe depuis l'enfance, mais en fait, t'apprends avec la famille, puis les amis et tout ça. Et en fait, je pense que c'est dû à, comme on est un territoire français, ils nous apprennent plus le français, l'histoire française alors que.. voilà, on nous apprend pas vraiment notre histoire à l'école. Maintenant ils commencent à le faire, et encore, je ne sais pas. Donc voilà, c'est plus la famille, les amis, tes recherches personnelles.
Moi : Quel est ton avis là dessus ?
Jo : Je pense que ça devrait changer, que c'est une bonne chose, qu'ils réadaptent, qu'ils mettent ça dans les écoles, parce que c'est pas tout le monde qui sait le parler mais qui sait l'écrire, tu vois. Y a pas d'orthographe mais ça a un orthographe ( rire) .. Comment t'expliquer... tu peux pas écrire ça n'importe comment, donc c'est bien qu'ils apprennent à écrire, je trouve que c'est vraiment une bonne chose, qu'ils apprennent à écrire le créole et tout, parce que, voilà, c'est bien. Mais, oui, ça devrait changer, qu'on apprenne surtout, l'histoire du pays aux enfants, dès leur jeune âge, parce que y ' a beaucoup beaucoup, qui connaissent pas l’histoire du pays. C'est pas mal tu vois, je connais pas toute toute l’histoire, mais .. en y pensant, il faut que je refasse un petit tour de ce côté, mais franchement, , ça serait bien qu'ils mettent ça à l'école, parce que, ils font ça en Haïti , tu vois, ils apprennent , dès l'école, ils apprennent l'histoire de leur pays, et je trouve c'est une belle chose , c'est une bonne chose... »
A la suite de cet entretien, et des discussions que j'ai pu avoir avec d'autres martiniquais, j'ai fait des recherches plus théoriques, j'ai trouvé des articles et des documents institutionnels en rapport avec cette question. Il en ressort, dans les propos de JB, ainsi que dans les recherches que j'ai effectué, que le langue perd en qualité, elle change , et on peut donc parler de « créolisation » du français ou bien d'une francisation du créole. Dans l'article de Miehakanda M'Badi, il est dit qu'il y a encore trop peu d’expériences dans le milieu scolaire, et que quand il y en a, elles sont l'initiative « d'enseignants militants ». Dans les textes de loi, rien n'interdit l'usage du créole dans les établissements, mais c'est, et je fais le rapport une fois de plus avec mon entretien, un effet, une répercussion de leur propre représentation des langues et de leur éducation. De plus les parents des enfants inscrits, ont une attente particulière par rapport à la maîtrise du français, qu'ils jugent être un atout. Je cite : « Une directrice d’école maternelle située en zone résidentielle témoigne des résistances des enseignants de son établissement à utiliser les supports en langue créole mis à leur disposition dans le cadre d’expressions poétiques. Une de ces personnes corrobore son positionnement réfractaire en affirmant qu’elle n’accepterait d’utiliser ces supports que si elle y était contrainte, ce qui donne à réfléchir sur les rapports qu’elle entretient avec cet idiome qui est pourtant l’un des siens. Cela nous donne en tout cas un aperçu des intentions éducatives et des représentations linguistiques d’adultes chargés d’instruire les enfants en Martinique. », c'est très révélateur. Certains enseignants sont formés au CAPES créole ( secondaire) et en Langues et Cultures Régionales, avec l'accompagnement de groupes de recherches. L'auteur souligne le fait « qu'il est plus question d'enseigner la langue régionale, plutôt que d'enseigner en langue régionale ». Ici je trouve que c'est percutant de sens, le colonisateur à instaurer sa norme, qui est la langue française, au point d'en aliéner beaucoup, et maintenant on « apprend » le créole, qui est pourtant une langue qui est parlée depuis des siècles par les antillais. Le 10 avril 2009, il y a eu un amendement qui a introduit les langues créoles dans le patrimoine national français. JB m'a dit qu'il pense différemment selon la langue qu'il emploi, je lis dans l'article , que « chaque langue est vecteur d'une culture et d'un mode de pensée personnel ». Et les 2 se rejoignent en expliquant que le créole est plutôt de tradition orale, et basé sur le vécu dans les plantations coloniales, tandis que le français est de tradition écrite.
Expérimentations réalisées dans des écoles martiniquaises :
Sur expértihéque, j'ai lu deux expérimentations en rapport avec la langue créole, au sein d'écoles de Martinique. L'une a été testé sur des élèves de 6ème SEGPA. La problématique était que 60% de ces élèves ont le créole en langue maternelle, 50% sont d'origines anglophone. Ils ont de grosses difficultés syntaxique à l'oral et à l’écrit. Le projet était donc d'enseigner en créole et en français pour améliorer les résultats. Pour cela ils avaient 4h par semaine de français et 2h par semaine de créole. Il a été observé qu'il y a eu une amélioration à l'oral et à l'écrit et sur les compétences des connaissances du socle commun. Les enseignants ont amélioré leur compétences professionnelles et leur enseignements des langues vivantes. Et ils ont développé une meilleure capacité d 'analyse des phénomènes et structures langagières des deux langues à l'oral et à l'écrit. Les parents participent plus et accompagnent plus la scolarité de leur enfants. Les élèves se questionnent sur leur environnement proche, sur leur tradition et sur les faits culturels. Cela a permis aussi d'éviter des situations de décrochages scolaire. La deuxième expérimentation a été réalisé sur des élèves de 5ème dans deux disciplines : l'EPS et une matière scientifiques. Le créole est utilisé dans la cour, à l'école, dans la rue, en cas de conflit, souvent pour exprimer des émotions, majoritairement négatives. Pour les enseignants, l'utilisation du créole se fait pour déclencher un apprentissage, faire comprendre une consigne ou gérer une situation de conflit. Le problème pour les élèves, est qu'ils n'ont pas toujours conscience de pratiquer le français et le créole, donc il y a des confusions et le glissement d'une langue à l'autre n'est pas forcément maîtrisé. Ici,, il s'agit plus ou moins de la même méthode que la première expérimentation. Une partie du cours est en créole et le reste de l'heure est en français. Pour les élèves, il a été constaté qu'il y a eu un déblocage des situation de crispation, des incompréhensions de consignes. Les élèves se sont libérés. Le passage entre le langage de la maison et celui de l’école est mieux géré. La relation entre les élèves et les enseignants est meilleure, il y a plus de proximité, les enseignants ont moins à répéter les consignes. Plus généralement, les élèves qui étaient en situation de décrochage ne le sont plus. L'intégration pour les allophones ou les métropolitains est plus simple.
Pour moi, le créole est une langue qui vient de l'esclavage, un mélange d'influences venant des pays colonisateurs. Le comble est qu'aujourd'hui, cette langue ne trouve pas de légitimité, elle est toujours sous la coupe du colonisateur français. Elle perd en qualité. En traînant sur les réseaux sociaux, je tombent sur certains débats : je lisais des messages d'un jeune martiniquais qui prônent le respect de l'orthographe du créole. Beaucoup d'internautes l'ont soutenu, tandis qu'une jeune femme, elle même antillaise lui a répondu que l'orthographe n'était pas important, que de toute façon, le créole est une langue orale et donc, que chacun utilise l’orthographe qu'il souhaite. Encore une fois je trouve ça révélateur d'un problème de fond. La Martinique est encore colonisée, soit dit en passant, ainsi que certains esprits. La langue met en lumière ces problématiques d'aliénation, colonisé, colonisateur....
Aparté : Lorsque je cherchais encore quel terrain j'allais choisir, j'ai interrogé un de mes cousins, qui est ivoirien, et qui est en France depuis 3 ans. Il a 20 ans. Je lui ai demandé comment se passait la transmission des traditions au sein de l'école. Il m'a expliqué qu'il n ' y en avait pas vraiment, qu'au primaire, ils faisaient des potager, et qu'ils se « déguisaient » en tenue traditionnelle. Le terme « déguisé » m'a marqué, je trouve qu'inconsciemment, il est signe d'une forme d'aliénation. C'est une tenue qui vient de chez lui, que ses ancêtres portaient et que certains continuent de porter, donc le terme déguiser n'est pas adéquat.
- Miehakanda, M'Badi. « Vers une culture de la diversité », Enfance, vol. 4, no. 4, 2011, pp. 497-507. - http://eduscol.education.fr/experitheque/fiches/fiche10140.pdf - http://eduscol.education.fr/cid54713/langues-de-france-d-outre-mer-ecole.html - http://eduscol.education.fr/experitheque/fiches/fiche12096.pdf - http://eduscol.education.fr/pid23199-cid55282/enseignement-creole-convention-etat-region-martin ique.html
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